Thang-stong rgyal-po

60 000,00

Pigments à la détrempe sur toile
Tibet central
Fin XVIe – début XVIIe siècle
D. 83 x 64 cm ou 32 ¾ x 25 ¼ in

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Description

Sur ce thang-ka, le personnage principal, traité comme il est habituel en taille héroïque, concentre l’attention.

Dans l’art tibétain, jusqu’aux environs du XVe siècle, les portraits des saints hommes sont des images de convention. Il n’en sera plus de même ensuite. Les représentations fidèles des pontifes faisaient partie des « reliques de corps » dont la vénération apportait des mérites à leurs dévots. Ainsi les traits du présent personnage pourraient être ceux de Thang-stong rgyal-po (1385-?-1464 ?), caractérisés par une barbe se terminant par de longues mèches de poils. Ce grand mystique participe de l’ordre ‘Brug-pa, branche de l’école monastique des bKa’-brgyud-pa. Métallurgiste, il est célèbre pour la construction de plusieurs ponts de chaîne, véritables tours de force à son époque. On lui doit également l’édification du stūpa de Dhung-tse lha-khang aux environs de sPa-ro au Bhutan. Il est également l’inventeur de « l’opéra tibétain ».

Cette séduisante Identification reste cependant sujet à discussion. Dans son iconographie la plus habituelle, Thang-stong rgyal-po, assis, les mains dans le giron, tient un vase d’abondance. Sur d’autres représentations, il possède des gestes variés mais il est identifiable à une chaîne de fer dans la main droite. Sur une peinture murale commentée par David Jackson (2015, p. 135), les deux traditions sont réunies, la main droite tendue en direction du sol tient la chaîne et la gauche, dans le giron, supporte le vase.

Les deux mains pendantes, tel un ascète au repos, sont des gestes rares dans l’iconographie tibétaine mais cependant bien attestées, ainsi en nous restreignant au seul Panthéon de l’Aṣṭasāhasrikā, on compte sept religieux dans cette posture (Chandra, 1991, n°1514,1722, 1729, 1958, 1964, 1977, 2021, 2099, 2110) mais aucun ascète.

En haut de la peinture, se tient le magicien Padmasambhava (VIIIe siècle) ce qui induit que les autres personnages représentés s’inscrivent dans une filiation spirituelle remontant à ce maître, concernant l’étude d’un texte ou la pratique d’un rituel particulier. L’un des vingt-cinq disciples de Padmasambhava, Sangs-rgyas-ye-she, coiffé du chapeau noir des danseurs farouches, se trouve d’ailleurs à la gauche du personnage principal (Chandra, 1991, n° 1660). Lui faisant pendant, on reconnaît peut-être Mar-pa (1012-1096) et en dessous son disciple, le poète mystique Mi-la-ras-pa (1040-1123). Deux figures importantes de la tradition bKa’-brgyud-pa. Il est difficile d’identifier les autres religieux dont les coiffes appartiennent aux ordres bK’a-gdams-pa, Sa-skya-pa et bKa’-brgyud-pa.

L’œuvre participe du « nouveau style sMan-bris » (sMan-bris gsar-ma), créé par le peintre Chos-dbyings rgya-mtsho, actif de 1620 à 1660 environ, manière particulièrement appréciée par le Ve Dalai-lama (1617-1682). La présente peinture en possède toutes les caractéristiques : fond foncé vert et brun, dessin d’une extrême méticulosité qui pourrait faire penser à l’art de la miniature. Ainsi certains détails sont repris à l’or. Des motifs, comme les nuages « ourloupés » et les rochers, sont empruntés à la tradition chinoise.

Rare par son iconographie très inhabituelle, remarquable par son traitement pictural raffiné, cette peinture, malgré ses divergences sectaires, participe du grand art tibétain tel que le révèlent les chantiers grandioses menés par le Grand Ve, et perpétué par le régent Sangs-rgyas rgya-mtsho, aux affaires de 1679 à 1705.

Provenance : Collection J. Stewart, Europe.

Art Loss Register Certificate, ref. S00106952.

  • Candra, Lokesh, Buddhist iconography. Compact Edition. New Delhi : International Academy of indian Culture – Aditya Prakashan, 1991.
  • Jackson, David P., Painting Traditions of the Drigung Kagyu School. New York : Rubin Museum of Art, 2015.

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