Le tathāgata Ratnasambhava
88 000,00€
Bronze
Vallée du Swāt
Circa Xe siècle
H. 17 cm ou 6 ½ in
Description
Le bouddhisme mahāyāna avait multiplié les buddha, associant à certains d’entre eux une région particulière de l’espace, par exemple l’Ouest pour Amitābha. A partir du VIIe siècle, un courant spirituel nouveau, le Vajrāyana, systématisera ces spéculations et placera au sommet de son panthéon cinq buddha transcendants, appelés « jina » (« Vainqueurs ») ou « tathāgata » (« Ceux qui sont ainsi »). Ils se manifestent sous l’aspect de corps glorieux (Saṁbhogākaya : littéralement « corps de jouissance ») dans les cieux bouddhiques, lieux abstraits, en dehors du monde phénoménal, peuplés de bodhisattva et d’entités transcendantes diverses. C’est également sous cet aspect qu’ils peuvent apparaître au méditant.
Trois ouvrages anciens sont en partie ou en totalité consacrés aux cinq jina. Ainsi le Guhyasamāja tantra, Le Tantra de la rencontre du secret, appelé également Tathāgataguhyaka sūtra, Le Secret de Tathāgata, est rédigé pour sa plus grande part à la fin du VIIe ou au début du VIIIe siècle. Dans ce groupe, Ratnasambhava occupe la direction du Sud. Assis en position du diamant, il fait le geste de don (varadamudrā). Sa carnation est jaune ; son attribut, le joyau, sa parèdre, Māmakī et sa monture, le cheval. Comme les autres tathāgata, il peut comme ici être couronné en tant que souverain du monde. Ce dernier détail explique que le trône soit soutenu par deux lions, animal royal par excellence. Le cheval, la monture de Ratnasambhava, figure de manière stylisée à l’avant du trône.
La statuette est caractéristique de la production du Swāt, vallée au nord de l’actuel Pakistan, autrefois traversée par une piste caravanière en direction du Turkestan chinois et entretenant des liens multiples avec le Kaśmīr tout proche. De ces deux régions proviennent de nombreuses statuettes représentant divers buddha ou bodhisattva, la main gauche tenant un pan de vêtement, relevée avec élégance. Le manteau monastique plaqué sur le corps en « drapé mouillé » perpétue un trait de style qui, par-delà l’art du Gandhāra, trouve son origine dans l’art hellénistique. On notera l’aspect stylisé des motifs floraux du diadème ainsi que la traduction graphique des phalanges des mains, deux caractéristiques de l’art kaçmîrien et des territoires alentours. Le visage poupin et un peu disproportionné sera abandonné au Kaśmīr pour un canon plus svelte et élégant à l’avènement de la dynastie des Lohara en 1003.
Les pièces de comparaison sont nombreuses, avec bien évidemment à leur tête l’exceptionnel Śākyamuni de la collection Pan-Asian (Pal, s.d. p. 53, n°26). Citons les deux exemples reproduits par U. von Schroeder (1981, p. 116-117, n° 15 F, et à un moindre degré, p. 122, n° 18 A) et, pour des statuettes provenant du Swāt proprement dit (Pal, 1975, p. 200-201, n° 76 et p. 202-203, n° 77).
Provenance : Collection privée, Tokyo, Japon, depuis 1981
Publication : U. von Schroeder, Indo-Tibetan Bronzes, Hong Kong, 1981, p.97, fig.12D
Kuboso Memorial Museum of Arts, “Gilt bronze Buddha from Classic Chinese and Central & Southeast Asia,” Izumi, 1988, no.84, p.95
Himalayan Art Resource (himalayanart.org), item no. 24310
Exposition : “Gilt Bronze Buddha from Classic Chinese and Central & Southeast Asia,” Kuboso Memorial Museum of Arts, Izumi, 1988