Frise figurant le Buddha émacié

Schiste
Ancienne région du Gandhāra
Circa IIIe siècle
D. 22 x 37 cm

P668 Dossier détaillé FR

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Description

Le Buddha « aux portes du trépas » : une iconographie spectaculaire

Cette impressionnante représentation du Buddha Śākyamuni avant son Éveil le montre dans un état de maigreur extrême. Sa cage thoracique, ses muscles tendus apparaissent sous sa peau tirée, tandis que les traits de son visage sont fortement émaciés, ses joues creusées et ses pommettes saillantes. Conformément aux codes stylistiques de l’école du Gandhāra, ses cheveux ondulés intègrent sa protubérance crânienne (uṣṇīṣa) – symbole de sa grande sagesse – en un chignon, tandis qu’à l’arrière une auréole souligne encore son statut de « grand homme » (mahāpuruṣa). Figuré assis, les mains dans le giron en position de méditation (dhyānasana), sa posture est dramatiquement immobile. Il est tout juste vêtu d’une étoffe qui retombe à l’avant du trône. Ce dépouillement le plus total correspond à un épisode très précis de la vie du Buddha historique : ayant renoncé à son statut princier et dans sa quête spirituelle pour atteindre l’Illumination, Śākyamuni se livre alors à une ascèse particulièrement éreintante le conduisant presque à la mort. De part et d’autre se tiennent deux dévots porteurs d’offrandes florales, tous deux vêtus à l’indienne, le torse nu, parés d’une longue écharpe, de riches bijoux et de coiffures sophistiquées.

Une œuvre typiquement gandharienne

C’est au Gandhāra que se met en place l’iconographie du Buddha sous une forme humaine et c’est encore au Gandhāra que seront réalisées les sculptures les plus spectaculaires figurant le Buddha émacié. L’école du Gandhāra met en effet l’accent sur la dernière existence du Buddha, ainsi que sur ses vies antérieures ou jātaka. Les textes du Lalitavistara Sūtra (dans le cas de cette stèle) ou de Divyāvadāna sont littéralement mis en image dans cet art qui développe un style syncrétique. Ce syncrétisme se manifeste notamment dans la présence des pilastres et colonnes selon un dispositif bien connu des Grecs qui permet de cloisonner et scander les différents moments d’un récit, comme c’est le cas ici. Par ailleurs, les chapiteaux composites à motifs d’acanthes témoignent de l’influence stylistique hellénistique et romaine qui caractérise cet art unique.

Une représentation rare

Si la figure du Buddha émacié est une image emblématique de l’art du Gandhāra et marque indéniablement les esprits par sa grande puissance visuelle, les exemples de cette iconographie dans les musées ou les collections privées restent très peu nombreux. On trouvera dans la littérature quelques reproductions de statues isolées mais les frises narratives sont encore plus rares et cela souligne donc le caractère exceptionnel de celle-ci. Le grand soin apporté à la représentation du Buddha, la taille significative des personnages et le bon état de conservation sont autant de qualités qu’il convient de noter.