Buddha prêchant

Grès
Inde du Nord-Est (Bihār, Bengale)
Circa XIe siècle. Dynastie Pāla (VIIIe-XIIe siècle)
H : 51 cm

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Description

De telles plaques, sculptées en faible relief, décoraient le soubassement des sanctuaires bouddhiques et des tumulus-reliquaires (stūpa), séparés le plus souvent par des pilastres. Sur la plaque ici commentée, un riche décor architectural abrite une niche trilobée. On remarque ainsi de larges piliers à pan coupés orné de guirlandes. Comme dans une architecture véritable, leur base est protégée par un pot, les isolant ainsi de l’humidité du sol et des insectes xylophages. L’ensemble n’est pas sans rappelé un fragment de soubassement provenant du district de Patna au Bihār, datant du IXe siècle et conservé au Los Angeles County Museum (Pal, 1988, P. 71, n° 71. Inv. 79. 188). Les chapiteaux portent un arc ouvragé de type toraṇa aux extrémités en forme de protome de monstre makara, moitié crocodile et moitié éléphant. Ces créatures fantastiques crachent des guirlandes perlées. Au-dessus, on identifie les différents gradins d’une toiture en terrasses superposées de type prasada. La niche principale et les trois petites niches de l’assise supérieure abritent des buddha. Celui de grande taille, couronné fait le geste d’enseignement, faisant tourner la roue de la Loi (dharmacakra mudrā). La présence des jina du bouddhisme ésotérique dans la partie supérieure et dans les polylobes de la niche principale inciterait à identifier la divinité principale à Vairocana, le jina du Centre. C’est d’ailleurs sous cette appellation que l’œuvre a été identifié lors de sa vente récente à New-York (Christie’s, n° 4049).

Cette identification pose deux problèmes. Vairocana serait en effet représenté deux fois, d’une part dans la niche principale mais également dans la petite niche centrale de la toiture supérieur. Afin d’éviter cette redondance, on pourrait supposer que la déité principale soit Mahāvairocana, forme supérieure à Vairocana. Mais là également, nous rencontrons une impossibilité. Dans les textes canoniques fixés en pays pāla, aux IXe-Xe siècle, Mahāvairocana figure toujours à quatre têtes et non    avec une seule. Ces divinités au sommet du panthéon religieux prêchent dans les cieux bouddhiques à une kyrielle de buddha et de bodhisattva les textes les plus complexes de la littérature spéculative du Vajrayāna. Ici, dans la partie inférieure du relief une petite roue encadrée de deux cervidés permettent d’identifier avec certitude la scène : le premier sermon du Budha Śākyamuni dans le parc aux gazelle de Sārnāth, aux environ de Bénarès.

Si les représentation de Śākyamuni couronné tel un souverain universel (cakravartin) sont bien connues en Asie du Sud Est, même dans  un contexte therāvāda, l’origine de cette iconographie doit être recherché en Inde.  Ainsi le Buddha historique figure couronné lors de la prise à témoin précédant son Eveil, entouré d’évocation des autres hauts faits de sa vie, sur des stèles pāla tel un exemplaire conservé à l’Indian Museum de Kolktata (Loth, 1994, p. 151, fig . 224) ; ainsi qu’une autre conservé au Museum of Fine Arts de Boston (Susan et John Huntington, 1990, n° 31, p. 158, Inv. 24. 153).

Le Musée national des Arts asiatiques – Guimet (Parlier-Renault, 2010, p. 113.  Inv. MG 5835) conserve un relief qui présente tant d’affinités avec le nôtre qu’on pourrait supposer qu’ils proviennent tous deux du même atelier. On est ainsi frappé par le même profil des modénatures, des toitures et de l ‘ensemble des autres parties sculptées.  Seules différences : les makara sont remplacés par des grues célestes (aṁsa), le masque de Kīrtimukha est de plus grande taille et la partie inférieure du relief est orné de grand motifs floraux. Le relief de Guimet provient du Bihār, peut-être de Bodhgayā. Leurs dimensions sont voisines : 52,1 cm de hauteur pour le relief du musée Guimet et 51, 4 pour le relief ici commentée.

 

Provenance : Collection privée, Bruxelles, acquise en 1980.

Art Loss Register Certificate, ref. S00106950

Exposition : Sculptures des Indes, Société Générale de Banque, Bruxelles, 8 décembre 1978 – 31 janvier 1979.

Bibliographie : A. Neven, Sculptures des Indes, 1978, p.22, cat. no.173.